Plante discrète qui pousse à la hauteur des souliers, la savoyane passe souvent inaperçue des randonneurs. Ses feuilles lustrées se divisent en trois et rappellent celles de la coriandre. Un plant de savoyane forme généralement une talle, où chaque feuille est reliée par un réseau de tiges souterraines : les rhizomes. Creuser le sol pour les déterrer permet de confirmer qu’il s’agit de la bonne plante, car il est impossible de se tromper en découvrant leur couleur jaune-doré !
D’apparence frêle, la savoyane est en réalité une plante puissante. Peut-être serez-vous étonné d’apprendre que son feuillage persiste tout l’hiver ? Il est donc possible de la retrouver dès que la fonte printanière laisse paraître le sol forestier. Son rhizome, quant à lui, possède des vertus antiseptiques importantes qui constituent un attribut majeur de cette petite plante. La berbérine, pigment jaune qui a valu à la savoyane le nom « fil d’or » en anglais, est souvent qualifié d’antibiotique naturel. Elle agit localement avec grande efficacité pour freiner la croissance des bactéries ou des champignons qui créent des infections sur la peau et les muqueuses.
La savoyane est utilisée depuis longtemps pour traiter les problèmes de la bouche, comme la gingivite, le muguet et les ulcères. Maintenant, on sait aussi que la berbérine aide à restaurer la santé des muqueuses, qui est souvent en cause lors des infections chroniques. Si vous avez tendance à développer des toux, des sinusites ou des rhinites à répétition, la savoyane peut vous aider à fortifier les muqueuses de l’ORL pour les rendre plus résistantes aux irritants, tout en chassant l’infection.
Après s’être incliné pour repérer la savoyane, il faut lever les yeux pour trouver l’usnée. Ses filaments gris-vert ornent les branches des vieux conifères, semblables à de longues barbes. L’usnée est un lichen : elle se compose d’une algue et d’un champignon vivant en symbiose. Si vous rompez une usnée avec vos doigts, vous observerez un mince fil blanc élastique en son centre : le champignon. L’algue l’entoure et donne au lichen sa couleur. Algue et mycète s’unissent pour garantir leur survie grâce à l’échange des ressources disponibles à chacun. Qui se serait douté que de ce duo émergeraient aussi des qualités complémentaires au service de notre santé ?
La portion fongique de l’usnée est riche en substances qui activent notre immunité et fait appel à nos défenses naturelles pour enrayer les microbes avant qu’ils ne s’installent pour de bon. De son côté, l’algue est antiseptique et s’attaque directement aux bactéries responsables d’infections de l’ORL et des poumons. L’usnée soulage aussi la toux en facilitant l’évacuation du mucus dans les voies respiratoires. Dans un seul lichen se rassemblent trois remèdes contre les infections hivernales !
Lorsque les membres de notre entourage sont malades et que la gorge commence à nous piquer, c’est le moment d’utiliser la teinture d’usnée. Sinusites, pharyngites, otites, bronchites et pneumonies peuvent ainsi être évitées. Polyvalente, l’usnée ne s’en tient pas qu’aux infections respiratoires. À elle seule, elle est un arsenal contre des envahisseurs de tout acabit : parasites, protozoaires, mycoses et certains virus. Mais attention ! Elle doit entrer en contact avec les pathogènes pour effectuer son travail. On l’utilise donc par voie orale pour soigner la muqueuse des voies respiratoires ou digestives et en externe pour traiter la peau.
Quittons maintenant la forêt québécoise pour nous intéresser à un arbuste du continent africain : le balsamier. Bien que peu de gens d’ici soient familiers avec cette plante épineuse, la plupart ont déjà entendu parlé de la résine qui en est extraite : la myrrhe. Selon les croyances chrétiennes, la myrrhe était l’un des cadeaux offerts à l’enfant Jésus par les Rois Mages. À l’Antiquité, elle était réservée à l’usage exclusif de l’élite, qui s’en servait pour fabriquer des parfums, des encens et pour embaumer.
Comme la savoyane et l’usnée, la myrrhe est fortement antibactérienne. Elle excelle dans le soin des infections de la gorge, car en plus de vaincre les microbes, elle calme l’inflammation et réduit la production excessive de mucus dans les voies respiratoires. Elle est si efficace qu’elle mérite d’être essayée lorsque d’autres traitements ont échoué. Et comme elle ne fait pas les choses à moitié, elle se chargera aussi de réparer les lésions une fois débarrassé de l’infection.
Dans l’impossibilité de vous procurer vous-mêmes ces cadeaux de la nature, la Clef des champs s’est donné pour mission de vous les rendre accessibles. Patiemment, ses vaillants horticulteurs récoltent les fils d’or de la savoyane, gramme par gramme. Ils bravent le froid hivernal pour décrocher les usnées, ces barbes de nos forêts. Autant d’efforts seraient déployés pour obtenir la myrrhe, si seulement le balsamier osait pousser dans nos contrées ! Ces trois produits, savamment transformés en teintures de grande efficacité, font partie des indispensables pour terminer l’hiver en pleine santé.
par Marilyne Demers – Herboriste à Clef des Champs
Agronome de formation, Marilyne s’est laissé guider dans son parcours par sa passion des plantes médicinales, qui font partie intégrante de son quotidien depuis une dizaine d’années. Nouvellement herboriste-thérapeute, elle a été 8 ans horticultrice à la Clef des champs avant d’y devenir recherchiste et rédactrice en herboristerie.
